Le 19 mars à 18h, M. Marc Jégou, Président de l’Association Yosakura de Nantes a présenté dans la Salle de Conférence des Archives départementales l’histoire, les règles et l’esprit de ce jeu.
M. Marc Jégou s’ est toujours intéressé à la Chine. Il a d’abord découvert le jeu de go à l’âge de seize ans, puis, devenu étudiant, a produit un premier travail sur les communes populaires en Chine. Entré à l’INALCO il a étendu sa curiosité à la Corée et au Japon, et n’a pas manqué récemment de poser les bases d’une « concurrence » entre l’IA, et l’intelligence humaine sous ses manifestations traditionnelles : calcul, stratégie, analyse.
Le go, dont l’origine la plus lointaine semble remonter à la période des Zhou (1066-221 avant J-C), trouve sa véritable forme sous la dynastie Qin, au cours de la première unification de la Chine (221-206 ante C). Aujourd’hui, ce jeu dont les applications concernent (et ont pu concerner) la guerre en réseau, la guerre de partisans, actuellement le management, est désormais considéré en Chine et au Japon comme un sport. En Corée il s’appelle Baduk, au Japon Nihon ki-in. En Europe, il n’est vraiment connu que depuis la description qu’en a donnée voyageur et jésuite Matteo Ricci (1552-1610). En France, il est introduit depuis 1969, mais n’est pas encore reconnu comme un sport. M. Jégou cultive l’espoir de voir le go entrer dans la liste des disciplines olympiques à court terme.
Preuve du succès de ce jeu : plus de quarante millions de personnes, réparties en 77 pays, le pratiquent. Un Championnat du monde de go est organisé chaque année.
Après cette riche introduction, M. Jégou décrit l’aspect matériel du jeu, les dimensions du plateau, le nombre de lignes, les pièces (ou « pierres »): 180 sont blanches, 180 sont noires. Petites particularités locales : au Japon, elles sont ovales ; en Chine, aplaties sur le fond. Pour les fabriquer, on taille au Japon quatre cubes dans un tronc de kaya. Les « pierres » blanches peuvent être en coquillage, les noires en ardoise.
Le but du jeu n’est pas de saisir une pièce, mais de l’encercler. D’ailleurs, les traductions possibles du nom peuvent être « encerclement », ou « dialogue manuel ».
Les règles sont précises et permettent de placer une pierre à une intersection jointive des lignes du tablier de jeu, ou de la relier à d’autres pour former des chaînes qui rendront tout mouvement de la pièce visée impossible. Comme dans la plupart des jeux, certains coups sont interdits.
A ce point de son exposé, Marc Jégou présente quelques-unes des interprétations symboliques et légendaires du jeu. Il en souligne l’extension sous les Han (221 av. J-C /220 ap.). Et pour en montrer l’importance culturelle dans la Chine d’aujourd’hui, il projette une video de 2005 : deux champions s’affrontent, sous le toit d’une pagode. Les déplacements des pièces sont commentés au ras du sol par deux spécialistes, en même temps que des pratiquants d’arts martiaux « miment » les coups et commémorent l’époque lointaine des Royaumes combattants.
L’exposé se poursuit par une évocation des œuvres littéraires et philosophiques dans lesquelles se retrouvent divers aspects du jeu. Par exemple, dans son célèbre traité L’art de la guerre, Sun Tzu distingue, comme au jeu de go, deux sortes de forces actives dans un combat : force normale directe, force normale indirecte. Mao Tsé Toung lui-même affirmait s’être inspiré du go pour élaborer sa théorie (et sa pratique) de l’encerclement des villes par les campagnes. Aujourd’hui, c’est la métaphore du « collier de perles » qui illustre la stratégie chinoise dans le Sud de la Mer de Chine.
L’univers du manga (Hikaru No Go), comme celui du roman, s’inspire du jeu. Georges Pérec a même laissé un Petit traité du go. Les plus grands esprits s’y sont intéressés : G. Leibniz, par exemple, pour élaborer ses théories du calcul.
Merci à M. Jégou pour cette conférence.
Christian Parfait pour ANC